Lundi dernier, le secrétaire national d'EELV Julien Bayou a annoncé dans un communiqué de presse sa démission du parti et de la présidence du groupe écologiste à l'Assemblée nationale.
Accusé de violences morales envers son ancienne compagne, le député aurait cédé face à la pression des réseaux sociaux et des médias, estimant que la situation était devenue « intenable ».
Si Yannick Jadot avait lui-même appelé à cette mise en retrait, de nombreux observateurs se sont dits “choqués” par le fait que Julien Bayou renonce à se défendre.
«Je suis accusé de faits qui ne me sont pas présentés, dont mes accusateurs-ices disent qu'ils ne sont pas pénalement répréhensibles, et dont je ne peux pour autant pas me défendre puisqu'on refuse de m'entendre », a seulement déclaré le député.
👉 De toute évidence, nous venons une nouvelle fois d’assister à la condamnation sans appel d’un homme politique sur la seule base d’accusations reprises sans discernement par des juges autoproclamés.
S’il est choquant de voir ainsi triompher cette forme de procès, l’acceptation docile et silencieuse de Julien Bayou n’est pas sans poser problème : renoncer à opposer des arguments à l’indignation et à l’invective, revient à cautionner une forme de procédés qui ne devraient avoir cours en démocratie.
Une certaine conception de la Justice
Si d’aucuns se sont dits choqués par l’attitude résignée de Julien Bayou, peut-être est-ce le signe que celle-ci ne correspond pas à celle qui aurait pu être attendue de la part d’un élu.
En tant que membre d’un État de droit, Julien Bayou aurait en effet pu témoigner de son attachement à la Justice plutôt que de laisser s’imposer cette forme de despotisme de la vertu qui s’arroge le droit de contourner les institutions.
Faut-il en effet rappeler que les faits dont est accusé Julien Bayou n’ont fait l’objet d’aucune plainte et qu’aucune enquête judiciaire n’a été ouverte ?
Les enjeux de cette affaire vont bien au-delà de son simple cas particulier ; c’est plus généralement une certaine conception de la Justice et de la manière dont les désaccords doivent se résoudre en démocratie qui est en question.
En sa qualité de Représentant, le rôle de Julien Bayou était précisément de dénoncer et de s’engager à combattre cette forme de tribunal populaire sourd et aveugle à la raison qui porte atteinte à la liberté de tous.
Défendre la démocratie
S’il avait surmonté son propre désaveu personnel pour prendre la parole au nom de ceux qu’il représentait, c’est une certaine conception de la démocratie que le secrétaire national aurait pu défendre.
Dans la lignée du philosophe et homme de gauche John Dewey, le Député EELV aurait pu faire valoir que la démocratie ne se réduit pas à un ensemble d’institutions et de procédures mais qu’elle implique plus largement la présence d’un certain climat démocratique au sein de la société - ou dans les termes du philosophe américain d’un way of life.
👉 Défendre l’importance de cet état d’esprit démocratique c’est affirmer que les principes et les valeurs qui caractérisent la démocratie doivent irriguer toutes les sphères de la société et pouvoir être observés dans toutes les attitudes de la vie courante.
En effet, « les lois garantissant les libertés civiles telles la liberté de conscience, la liberté d'expression ou la liberté de réunion ne sont guère utiles si, dans la vie courante, la liberté de communiquer, la circulation des idées, des faits, des expériences sont étouffées par le soupçon, l'injure, la peur et la haine », soulignait en 1939, dans un texte intitulé “La démocratie créatrice”, le philosophe.
Une telle conception traduit l’importance que revêt en démocratie la communication qui lie étroitement le politique et le social au moyen de la délibération, de la discussion rationnelle et argumentée.
En vertu de ce que l’on nomme le “bien commun”, Julien Bayou aurait donc pu faire valoir qu’en démocratie les échanges ne prennent pas la forme de procès d’intimidation et d'indignation mais ont au contraire vocation à favoriser la libre circulation des idées, l’examen critique et la vérification des faits.
S’opposant à un modèle de société régi par la loi du plus fort, l’élu aurait pu défendre la possibilité de la discussion publique rationnelle et féconde, considérant, en suivant