Sainte-Soline : quand l’écologie déserte le champ politique
Écologie politique ou écoterrorisme ?

Suite aux violents affrontements entre manifestants et forces de l’ordre ayant eu lieu le week-end du 29 et 30 octobre à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, le Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a dénoncé « des modes opératoires » relevant de « l’écoterrorisme ».
L’emploi du concept d’« écoterrorisme » n’a pas manqué de susciter la polémique : de nombreux observateurs ont souligné l’usage inapproprié d’un terme ne figurant pas dans le code pénal français.
La députée Clémentine Autain (LFI) a quant à elle dénoncé l’emploi d’un terme outrancier visant à criminaliser l’action des manifestants pour occulter leurs revendications, et constituant en outre une « insulte aux militants écologistes […] et aux victimes de terrorisme ».
👉 S’il n’est pas infondé de s’interroger sur la pertinence de ces discussions sémantiques qui, organisant le débat autour de la pertinence du concept, tendraient à masquer les désaccords à l’origine de cette mobilisation, peut-être ne faut-il pas pour autant s’empresser de conclure à la vacuité d’une réflexion sur le sens des mots employés.
Si la proclamation de termes destinés à choquer ne constitue indéniablement pas une réponse politique, tenter d’identifier les raisons ayant pu conduire Gérald Darmanin à employer un concept aussi fort pourrait s’avérer éclairant.
Un résumé des faits et une brève analyse des notions en question pourraient même révéler en quel sens le terme d’écoterrorisme est inapproprié et néanmoins pourquoi le Ministre de l’Intérieur a eu raison de l’employer.
Rappel des faits
Malgré les multiples interdictions préfectorales visant la tenue de cette manifestation, les activistes se sont rassemblés afin de faire entendre leur mécontentement face à un projet qui constitue selon eux « un accaparement de l’eau ».
Des milliers de militants et d’agriculteurs, dont 400 habitués des "black blocs" et des mouvements violents ainsi que plusieurs élus et grandes figures de la cause écologiste comme Yannick Jadot, Sandrine Rousseau, et Jacques Maret, membre de France Nature Environnement, ont participé à cette mobilisation.
Masqués, cagoulés, vêtus de bleu de travail, scie à la main, armés de barres de fer et de cocktail molotov, les militants ont sectionné des canalisations d’eau et n’ont pas hésité à affronter les forces de l’ordre, venues en grand nombre pour tenter de contenir la manifestation.
En dépit d’un lourd bilan - une soixantaine de gendarmes blessés dont plus d’une vingtaine grièvement - l’action des militants écologistes n’a pourtant pas fait l’objet d’une condamnation unanime.
👉 Dénonçant l’emploi du concept d’écoterrorisme par le Ministre de l’Intérieur, certaines figures du courant écologiste ont fait valoir l’importance, face à la gravité de la situation actuelle, de renouer avec un écologisme de combat, tandis qu’au sein du parti de la France Insoumise d’autres voix se sont élevées pour réaffirmer - en dépit des faits - le caractère pacifique de la manifestation.
Un terrorisme écologiste ?

L’opinion semble avoir été choquée par l'équivalence implicitement établie entre les heurts survenus au cours de la manifestation de Sainte-Soline et les actes terroristes qui ont marqué notre époque, à savoir les attentats perpétrés par les djihadistes de l’État islamique.
Alors que nous commémorons la tragique date du 13 novembre, ce parallélisme entre des actions aussi incomparables paraît effectivement peu compréhensible.
En outre, en désignant par le même terme des actes aussi dissemblables, ne risque-t-on pas d’entourer d’un certain flou la notion même de terrorisme ?
Si le terrorisme recouvre une réalité contre laquelle nous devons lutter, qualifier de terroriste tout rassemblement contestataire susceptible de causer un trouble à l’ordre publique pourrait aboutir à